L’avalanche de séminaire prévu aux mois de mai et juin sur ce thème montre bien que l’innovation est encore une préoccupation en temps de crise. Néanmoins, même si j’ai écris un article pour montrer que la crise a un effet positif sur l’innovation, se pose la question de comment innover en temps de crise.
A priori, en temps de crise, la difficulté d’innover est renforcée par :
– Une baisse des prix ou du moins une pression vers la baisse des prix. Ce qui laisse beaucoup moins de marge pour les entreprises, donc moins d’auto-financement. Une baisse de l’autofinancement n’est pas favorable à l’innovation.
– Une plus grande difficulté à prendre un positionnement différenciateur. En effet, en général, une innovation s’adresse lors de son lancement à une niche, des individus ou entreprises qui ont les moyens de payer le surcoût de l’innovation, ou du moins qui sont prêts consacrer une partie de leurs revenus pour l’acheter. Ces niches sont plus rare ou la possibilité de les créer est plus difficile en temps de crise
– Le financement externe à l’entreprise est plus rare. Les banquiers, déjà réticent à financer l’innovation en pleine croissance, le seront encore plus en temps de crise
– De plus, les grandes entreprises ont tendance a plus rémunérer les actionnaires, justement parce que le financement bancaire est rare, ce qui leur réduit encore plus leur capacité d’auto-financement
Alors que faire ?
– Innover pour baisser les coût plutôt que de délocaliser. Les plans sociaux sont désastreux à la fois socialement et pour l’image de marque de l’entreprise. D’un côté, l’entreprise demande au consommateur d’acheter ses produits, de l’autre elle ferme les usines pour les délocaliser. Nous avons la chance d’avoir en France des collaborateurs bien formés, pourquoi ne pas faire appel à leur intelligence ? L’innovation participative qui consiste à associer tous les salariés à l’innovation fonctionne bien en temps de croissance, elle pourrait encore mieux fonctionner en temps de crise si toutes les parties prenantes de l’entreprise prennent conscience des enjeux.
– Changer de valeur. La crise c’est aussi une remise en cause des idées dominantes de la période précédentes. Les idées du capitalisme sans régulation et du système productiviste sont remises en cause. C’est donc le moment pour l’entreprise de se poser la question de la responsabilité “sociétale”. Il ne s’agit pas seulement de discours mais bien dans de positionner des valeurs sociales et environnementales dans les faits. Un tel positionnement permet de maintenir les prix afin de se donner les moyens de changer la nature du produit (moins gourmand en énergie, mois polluant…) et de produire d’une façon socialement plus responsable.
– Proposer des solutions pour économiser. Une autre piste consiste à proposer des produits qui permettent aux consommateurs d’économiser de l’argent. Proposer des produits qui consomment moins, qui font gagner du temps, qui font moins dépenser globalement
– Déporter la production chez l’utilisateur. C’est bien ce que fait Ikea ou les autres marchands de meubles depuis des années. Mais sur ce terrain il existe encore probablement d’autres voies à explorer. C’est le principe qui s’est développé avec le web 2.0 et le web social, une grande partie du service est soutenue par des contenus qui sont créés par l’utilisateur.
– Faire entrer l’utilisateur dans la conception. L’entreprise croit souvent qu’elle connaît mieux les besoins de ses clients que eux-mêmes. Dans une période de croissance, cette arrogance n’est pas trop grave. En période de crise, elle peut lui être fatale car l’utilisateur évolue alors plus vite que l’organisation. Le faire entrer dans le cycle de conception permet d’éviter des études de marché coûteuse et souvent inefficace quand les changements sont très rapides.
L’innovation en temps de crise est donc possible, d’autant plus que durant ces périodes les positions des entreprises changent très vite. Il faut apprendre à raisonner autrement, à aller au delà du premier réflexe qui consiste à réduire toutes les dépenses , mais plutôt orienter les dépenses vers les innovations et les services qui ont le plus de potentiels.
Pingback: La créativité en temps de crise du Covid 19