Les fonctions instrumentales, symboliques et politique des feuille de routes stratégiques
Les feuilles de route (roadmap) sont des outils stratégiques, souvent utilisés pour planifier l’innovation, qui permettent aux organisations de visualiser l’évolution souhaitée des objectifs, des capacités et des activités d’une organisation, d’une industrie ou d’un secteur d’activité au fil du temps. C’est un outil visuel et structuré qui représente les informations de manière chronologique, permettant ainsi de visualiser les étapes clés, les jalons et les échéances. La feuille de route intègre généralement plusieurs types d’informations, incluant des perspectives stratégiques et technologiques. Elle représente aussi visuellement les objectifs à atteindre, les capacités à développer et les activités à entreprendre pour réaliser l’intention stratégique.
Un aperçu générique des questions et connaissances d’une feuille de route
Dans un article publié en 2024, avec Romain Rampa, nous explorons le processus de construction d’une feuille de route stratégique et technologique pour identifier ses fonctions et affordances (possibilités d’action offertes), en se basant sur une étude longitudinale menée à Hydro-Québec.
On a identifié trois fonctions principales : instrumentale (centralisation et priorisation des connaissances, alignement des ressources), symbolique (construction d’un récit commun, changement culturel), et politique (négociation d’intérêts, légitimation d’activités).
Le développement d’une échelle de mesure des capacités créatives des organisations
Après 4 ans de travail sur la créativité organisationnelle de la créativité dans le cadre du projet CCO financé par l’ANR, j’ai publié en avril 2024 l’article Development of a multidimensional scale to measure organizational creative capabilities dans Journal of Product Innovation Management – avec Zeinab Sheet, Florence Jeannot et Romain Rampa
L’article est assez ardu à lire avec plein d’analyse statistique, je vous propose ici une synthèse pour rendre les concept de capacités créatives d’une organisation et les résultats plus accessibles. Avec ce papier publié dans la première revue internationale sur les recherche en management de l’innovation, on valide scientifiquement le concept de capacités créatives avec la confirmation du lien entre capacités créative d’une organisation et résultat créatif (les produits et services proposés par l’organisation) et une échelle de mesure pour l’évaluer.
Stratégies et business models à l’ère digitale
Suivre sa commande en ligne, gérer sa télévision avec son smartphone ou encore apprendre une langue via une application sont devenues des choses communes dans notre vie quotidienne. Au-delà de ces nouveaux produits et services, ces nouvelles technologies ont transformé des secteurs économiques, modifié des règles de concurrence et favorisé le développement de toutes nouvelles manières de faire des affaires.
C’est avec plaisir que je vous annonce la publication du livre Stratégies et business model à l’ère du numérique co-écrit avec Romain Gandia, un collègue de l’Université Savoie Mont Blanc.
Le guide pratique des communautés
Après 2 ans de travail intense, je peux enfin annoncer la sortie du Guide pratique des communautés. Ce livre est une mine d’or pour comprendre les communautés en organisation et agir pour les développer et les animer. Il est le fruit du travail de 71 contributeurs, patriciens et chercheurs sous la direction éditoriale de 5 éditeurs : Karine Goglio (Kedge Business School), Florence Crespin-Mazet (Kedge Business School), Catherine Thiesse (Schneider Electric), Louis-Pierre Guillaume (Amallte) et moi-même.
Un guide pratique pour tous ceux qui veulent comprendre et agir avec les communautés
Le livre propose 32 articles pour comprendre et 52 retours d’expériences et s’adresse aux praticiens en entreprise qui souhaitent animer, participer ou développer des communautés de pratiques, de clients, d’experts ou d’innovation au service du Business ou des intérêts de leur organisation. Mais il s’adresse aussi aux chercheurs pour trouver un ensemble de connaissances et des études de cas emblématiques, aux consultants pour les aider à développer le modèle en s’appuyant sur les meilleurs concepts de recherche et expériences de praticiens ; aux enseignants pour former au modèle des communautés en s’appuyant sur un ensemble de concepts appliqués et de pratiques, d’étude de cas emblématiques, illustrés par des témoignages récents. Et enfin bien sur aussi aux étudiants pour connaître et comprendre les enjeux des communautés afin d’en cerner les avantages dans les nouveaux modèles organisationnels et managériaux.
Sommaire du Guide Pratiques des Communautés
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Pourquoi Apple, Google et Microsoft gagnent-ils autant d’argent ?
Qu’est ce qui explique leur insolente réussite ? Leur position de domination au niveau mondiale ? Vous vous en doutez, la réponse n’est pas simple, et les causes sont multiples.
On l’explique souvent par leur capacité d’innovation technologique. Après tout Apple a créé le premier vrai micro-ordinateur grand public, Google le vrai premier moteur de recherche et Microsoft… et bien le premier système d’exploitation compatible avec de multiples marques d’ordinateurs. Mais l’innovation technologique n’explique pas tout.
Sauver la presse régionale : les leçons de la gestion des business models de Google, Apple et Microsoft
La presse régionale souffre des conséquences de la crise du Covid-19. Fragilisé depuis de nombreuses années à cause de l’affaiblissement de son modèle d’affaires traditionnel, la réduction de la distribution et les baisses des revenus publicitaires risquent désormais de lui être fatale. Ainsi, le quotidien Paris-Normandie a été placé en liquidation judiciaire le 21 avril suite à l’accumulation d’une dette de 7 millions d’euros. Cet exemple est loin d’être un cas isolé et de nombreux autres titres rencontrent des difficultés financières.
Les limites de la digitalisation du business model de la presse régionale
La situation n’est pas nouvelle et le diagnostic est connu : baisse du lectorat papier, baisse des points de distribution, baisse des recettes publicitaires, augmentation du prix du journal plus rapide que l’inflation (voir à ce propos le livre de Jean-Marie Charon, La presse quotidienne).
Le modèle d’affaires principalement basées sur les revenus de la vente de publicité et la vente d’abonnements est remis en cause par le développement de l’accès gratuit à l’information et la segmentation d’extrêmes des pratiques sur internet. La presse régionale peine donc à trouver un nouveau modèle économique dans le Nouveau Monde numérique de l’information alors qu’elle a un rôle central dans le maintien de la démocratie. D’après Clara Hendrickson, chercheuse pour la Brookings Institution, la crise de la presse locale serait une des causes de la crise de la démocratie américaine.
Les communautés virtuelles de crises
« Être seuls ensemble », depuis leurs confinements, les individus mobilisent les communautés en ligne, pour se soutenir, se divertir, et endiguer un virus à l’échelle mondiale. À l’origine, les communautés sont “des collectifs fondés sur la proximité géographique et émotionnelle, et impliquant des interactions directes, concrètes, authentiques entre ses membres”. Depuis 50 ans, le virtuel crée une nouvelle forme de proximité qui favorise l’apparition de communautés dans de nombreux domaines. Et paradoxalement, ces collectifs virtuels créent des affinités entre leurs membres. Traditionnellement, on distingue deux grandes catégories de communautés : les communautés de pratiques où l’attention est portée sur le partage et l’apprentissage de nouvelles pratiques, et les communautés épistémiques où l’objectif est la création de nouvelles connaissances. Profitant d’un monde reclus sur la toile, le nombre de communautés en ligne a fortement progressé. Mixant souvent ces deux catégories, plus ouvertes, plus massives et fulgurantes, ces communautés feraient-elles partie d’un nouveau type de communauté virtuelle : les “communautés de crise” ?
Un processus de mise en œuvre accéléré
Le contexte de crise lié au Covid-19 a un effet catalyseur sur la création de nouvelles plateformes virtuelles. Les communautés en ligne ont besoin de temps pour se construire, trouver leur public et créer du lien entre les utilisateurs. Le phénomène actuel, à l’inverse, semble accélérer ce processus de mise en place. Les outils nécessaires à la création de nouvelles communautés virtuelles sont préexistants (sites internet, réseaux sociaux), facilitant la naissance de communautés rapidement fonctionnelles.
La créativité en temps de crise du Covid 19
La créativité est la génération d’idées originales, faisables et utiles par des individus ou un groupe d’individus. À l’heure de la crise du Covid-19, nous avons besoin plus que jamais d’idées créatives pour surmonter les problèmes qui se posent à nous. Que ce soit pour endiguer l’épidémie, assurer les services essentiels, réparer les dégâts ou repenser la société après la crise. La recherche en créativité s’intéresse aux processus et conditions qui amènent les individus à avoir des idées créatives. Cette capacité est souvent considérée comme l’apanage des grands créateurs et innovateurs alors qu’en fait elle est intrinsèque à l’être humain.
Il suffit d’observer les bébés et les enfants dans leurs explorations quotidiennes pour s’en convaincre. L’éducation, l’expérience, les échecs, les critiques étouffent progressivement le potentiel créatif. David Kelley, l’un des créateurs du design thinking, soutient ainsi que nous sommes tous créatifs et le manque de créativité est lié au manque de confiance créative. La créativité est juste un muscle qui peut être renforcé et entretenu par l’effort et l’expérience.
La recherche en créativité s’intéresse au processus créatif, aux caractéristiques des individus et au contexte. Le contexte de crise du Covid-19 est favorable à la créativité. Il crée un sentiment d’urgence. Il nous motive et nous pousse à prendre des chemins de traverse pour répondre à l’exceptionnel. Pour la professeure de Harvard Teresa Amabile, dans son modèle componentiel de la créativité, la motivation est un des éléments de base de la créativité, avec les connaissances dans le domaine et les capacités créatives. La motivation est bien là et elle est poussée par les émotions provoquées par cette situation exceptionnelle.
Les travaux du psychiatre américain Silviano Arieti montrent bien le rôle fondamental de l’émotion sur la créativité. La psychologie de la créativité identifie des traits de personnalités et des styles cognitifs favorables à la créativité (voir à ce propos le livre Psychologie de la créativité de Todd Lubart) mais l’urgence est susceptible de transcender ces fondamentaux psychologiques. De plus la contrainte, notamment la pression temporelle, peut jusqu’à un certain niveau favoriser la créativité (voir à ce propos La créativité sous contraintes organisationnelles).
L’examen des processus peut donc nous donner des éléments à mobiliser pour trouver rapidement de nouvelles idées pour faire face à l’urgence.
Un nouveau livre sur l’innovation chez EMS : L’innovation de rupture de Benoît Sarazin
Des livres sur l’innovation, on en trouve des centaines, bourrés de concepts et de conseils pour aider les innovateurs en herbe ou avertis à mettre en place une stratégie d’innovation. Ces livres souffrent souvent d’un excès de concepts ou d’un excès de conseils pratiques sans profondeur, et il est rare de trouver un livre qui allie à la fois la recherche en management de l’innovation et l’expérience de conseil en innovation de l’auteur.
Le livre sur l’innovation de rupture de Benoît Sarazin fait partie de ces rares livres sur l’innovation qui mobilise des concepts compliqués de manière simple pour les mettre au service de l’action. C’est une bonne synthèse de ce qu’il faut savoir sur l’innovation de rupture avant de se lancer dans l’aventure. Il aborde avec détails les concepts liés à l’innovation de rupture, propose un processus pour mener à bien l’innovation et il décrit les actions pour mettre en place les conditions de succès. Il aborde aussi avec précisions la thématique des communautés d’innovation en exposant la méthode C3 (Canevas de Communauté Créative) qui permet de concevoir ou d’auditer une communauté créative.
Toutefois ce livre n’est pas exempt de limites. La première est de reprendre telle quelle, sans une grande prise de distance, le concept d’innovation de rupture « disrupted innovation » définit par Clayton Christensen. Ce terme a été traduit en français par innovation de rupture alors qu’en anglais il fait plutôt référence au pouvoir de perturbation de l’innovation que de rupture pure et simple. D’ailleurs Christensen insiste sur la perturbation progressive d’innovateurs qui ne sont pas toujours repérés par les entreprises établies. On est souvent loin de la rupture, le terme innovation de rupture est lui-même pour moi plus un terme marketing qu’un véritable concept. Au final il pourrait faire penser que ce type d’innovation est l’innovation ultime alors qu’en fait il n’y a pas de gradation de valeur dans l’innovation, tout dépend du contexte et des objectifs stratégiques de l’entreprise.
Le jeu peut-il rendre les étudiants plus créatifs ? Le cas du jeu le Bus à l’envers
Considérée comme une ressource utile au développement personnel, professionnel et aux transformations sociétales, la créativité consiste à produire des idées nouvelles et utiles pour résoudre un problème ou atteindre un objectif. Ces dernières années, le monde socio-économique (re)découvre les vertus de la créativité face à de nouveaux besoins de savoir-être transversaux et collaboratifs utiles au développement de l’innovation dans les entreprises et plus largement dans la société. Le World Economic Forum, dans son rapport sur le capital humain intitulé “Se préparer à l’avenir du travail” classe la créativité comme une des trois compétences dont les entreprises vont avoir le plus besoin.
Beaucoup d’entre nous, en lisant ces première phrases sont en train de se dire : « Oui, mais moi je ne suis pas créatif ! ». Fausse idée et malheureusement beaucoup trop répandue ! Chaque individu dispose de compétences créatives plus ou moins développées comme le montre les travaux de Gérard Puccio. Il n’existe pas, comme on semble parfois le suggérer ou le penser, d’individus non créatifs. Chacun a des préférences créatives et peut à un moment ou à un autre apporter ses connaissances, mettre en œuvre des savoir-faire ou développer des savoir-être utiles à une créativité individuelle et surtout collective.
Enseignant à l’université auprès d’étudiants en licence et en master, nous essayons de faire comprendre aux étudiants qu’ils ont tous une part de créativité en eux et qu’ils peuvent la développer. Cependant, nous avons fait le constat que, confrontés à la résolution d’un problème lors d’un processus créatif, nos étudiants avaient beaucoup de difficultés à générer des idées créatives. Ils ne se permettent pas de dépasser leurs schémas de pensée habituels. Ils ne s’autorisent pas à sortir hors du cadre, à penser hors des sentiers battus. De plus, dès qu’ils trouvent une ou deux idées, ils s’arrêtent ! Or comme le dit Linus Pauling, double prix Nobel de chimie : « le meilleur moyen d’avoir une bonne idée et d’avoir beaucoup d’idées ! ».